Vœux 2022

Photographie Claude Baudin
les animaux sont nés…

les animaux sont nés
Dans la chevelure

Dans la chevelure Dans les cheveux
Dans les grands cheveux
bleus des Fées

Dans les cheveux verts
des enfants des Fées

Dans les pas des grands
chevaux cosmiques dont le galop
arrache des mottes à la Terre

Dans les sentiers couverts de
feuilles grisaille douce
propice aux naissances
des micro organismes furieux

ils se jettent se précipitent
fous ivres se jettent se précipitent
dans la pâte noire du temps
fous ils brisent la nuit de marbre
des galaxies tournoyant folles ivres

Voient presque jusqu’au
bout de l’univers
avec leurs gros yeux blancs
ils mâchent les herbes râpeuses
boivent l’eau plombée des mares
s’ahurissent de reflets

Mélangent l’exact et le faux
la terre véritable et la poussière de plâtre
modèlent avec leurs pattes
habiles des petites figurines
grotesques qui vacillent sur deux jambes
balbutient.

les animaux ravis de l’avoir inventée
souhaitent une longue vie à notre humanité

texte : D.B.G.

Pour 2021

Photo : Claude Baudin

il tire la couverture à lui il nous tire les cheveux au milieu de la nuit il tient en suspens des destins essentiels / de ceux qui donnent de l’importance à nos jours il se croit le maître du monde il croît inconsidérément il est le nuisible de la fin de la journée la petite noirceur familière qui nous tient au lit le danger que nous oublions sauf la peur dans l’œil du passant du caissier du supermarché du compagnon de la ligne P de la coiffeuse et de la dame au petit chien il invente des nuages toxiques et des parcours de main en main il rend fou il rend éphémère

il est stupide et seul dans son enveloppe

il ne détient aucun pouvoir contre
la vie contre
le poème des jours ordinaires et
le goût sucré des acacias de
l’an prochain

D.B.G.

Pour 2020

Cosmos

 

Claude Baudin (photo numérique)

dans la pupille de l’univers
(ce fruit de prunellier)
pulsars quasars renards
cachés dans l’embrouille des ondes

avivent la curiosité des choses,
de l’indéchiffrable livre
enroulé sur lui-même
au point de capiton

dans les plumes de ses cristaux
les oiseaux magnétiques
cherchent leurs pôles
et tournent leurs rémiges

depuis un coin de ce désordre,
nos yeux ouverts, bronchant
sur la haie des ténèbres,
entrevoient le tissu du monde

nous n’avons pas le temps
c’est l’hiver ; nos pas de patineur
rayent la glace grise
et captent la lumière

au revers de l’année.

D.B.G.

 

Pour 2019

Impaire

photo Claude Baudin

s’imaginer arbre
passe-murailles
arrache-grilles
fauteur de troubles

marcher comme sorcière
aspirer la nuit
boire son souffle
mimer ses lunes

grimper aux branches
choisir sa prise
voir au travers
deviner vite

guetter sur la rue
le premier chat gris
qui prédira
le goût de l’année

DBG

 

 

 

 

 

 

 

Pour 2018

 

On a beau faire, un son trahit chaque mot — Traduire est en trop (Hubert Haddad) Photo Claude Baudin.

Où vont nos corps
mêlés aux corps des bêtes
mélangés aux cailloux
plissés par les montagnes
Où vont-ils,
bras serrés, yeux fermés?
Ils glissent avec les glaciers
vers la plaine inondée.
Depuis, tu tiens un caillou
dans ton œil.
(Dominique Barberet Grandière)